Indiana Jones vs Tintin

Les ressemblances entre Indiana Jones et Tintin, deux de mes héros d’enfance, m’ont inspiré cette illustration. Une couverture de bande dessinée imaginaire, dessinée dans le style ligne claire à la manière de Hergé ou d’E.P. Jacobs.

Quels sont les points communs et les différences entre l’aventurier de Spielberg/Lucas et le petit reporter de Hergé ? Hergé et Spielberg se sont-ils rencontrés ? Qu’est-ce qui m’a amené à dessiner cette illustration ? Quelles sont les caractéristiques et les difficultés de la ligne claire ? C’est ce que je vous invite à découvrir dans cet article.

Indiana Jones, dessiné comme une couverture de Tintin

Spielberg et Tintin

En 1981, à la sortie des Aventuriers de l’Arche perdue, aux journalistes qui lui demandaient si Indiana Jones était inspiré par Tintin, Spielberg répondait :

« Qui ? Jamais entendu parler ! »

Il faut croire que Steven a très vite comblé cette lacune. Quelques mois plus tard, il contacte Hergé pour lui demander les droits d’adaptation de Tintin.

Au début des années 80, Steven Spielberg est l’étoile montante d’Hollywood, le wonderboy qui pris le box-office par surprise avec Les dents de la mer (1975). Alors que son requin terrorise les salles obscures, la prépublication de Tintin et les Picaros débute dans les pages du journal Tintin. Les lecteurs ignorent alors que cette 23e aventure de Tintin, qui paraît en album en 1976, sera la dernière.

Hergé, malade, ne terminera jamais Tintin et l’Alph-Art, une aventure qui devait mêler ses deux grandes passions : la bande dessinée et l’art contemporain. Il meurt le 2 mars 1983, avant d’avoir pu rencontrer Spielberg.

Les deux créateurs ne se sont jamais rencontrés, mais ils s’estimaient mutuellement. Avant de mourir, Hergé a donné son accord à l’adaptation des aventures de Tintin au cinéma.

Spielberg envisage une trilogie, dans laquelle Henry Thomas (Elliott dans E.T.) incarnerait Tintin. Mélissa Mathison, scénariste de E.T., écrit un premier script. Le réalisateur envisage de tourner le film après Indiana Jones et le Temple maudit (1984), mais le projet est sans cesse repoussé. Transposer l’univers si particulier de Tintin au cinéma pose en effet bien des difficultés.

Il faudra attendre 2011 pour que le projet d’adaptation de Spielberg aboutisse enfin. En court de route, le réalisateur a renoncé aux prises de vues réelles. Avatar de James Cameron l’a convaincu que combiner la motion capture avec l’animation 3D était la solution idéale pour rendre justice au graphisme de Hergé. Produit par Peter Jackson (un autre fan d’Hergé) et réalisé par Steven Spielberg, Les aventures de Tintin : le Secret de la Licorne sort en 2011.

Les deux cinéastes prévoient une trilogie si le succès est au rendez-vous. Accueilli fraîchement aux USA, tant par la critique que le public, le film rencontre plus de succès en Europe, notamment en France et en Belgique. Ironiquement, plusieurs critiques reprochent à Spielberg de trop transformer Tintin en Indiana Jones.

Les résultats semblent avoir rafraîchi l’enthousiasme du duo. Le projet n’a pas été officiellement abandonné, mais le deuxième film, que Peter Jackson devrait réaliser, se fait toujours attendre.

Ressemblances et différences

J’avais environ 12 ans quand j’ai découvert Les Aventuriers de l’Arche perdue. En vidéo, sur une petite télé, mais c’était tout de même un fameux choc. J’y retrouvais ce que j’aimais dans les albums de Tintin. Le mélange captivant d’aventure et d’exotisme. L’action et l’humour. Les personnages secondaires « too much ».

Il y avait aussi pas mal de différences. La romance. Le sang et la violence. La touche surnaturelle. Autant d’éléments qui sont absents des bandes dessinées, mais qui sont bien présents dans les films. Et puis, malgré leurs points communs, Indy et Tintin sont deux personnages bien différents. Le reporter d’Hergé n’est qu’un gosse, coincé à jamais entre l’enfance et l’âge adulte, intelligent mais candide. L’aventurier de Lucas et Spielberg est un personnage bien plus nuancé. Un adulte qui a déjà pas mal roulé sa bosse, qui évolue dans une zone grise entre le bien et le mal, entre l’archéologue et le pilleur de tombes. Un homme qui vieillit, qui se trompe. Un caractère bien trempé, plus proche parfois de celui de Haddock que de Tintin.

Blake et Mortimer

En découvrant, au fil des ans, les films ultérieurs de la saga Indiana Jones, les familiarités avec les aventures de Tintin ne m’ont jamais quitté. Mais Indiana Jones m’a toujours aussi fait penser à deux autres personnages emblématiques de la ligne claire belge : Blake et Mortimer de E.P.Jacobs.

Un album en particulier de Blake et Mortimer évoque les Aventuriers de l’Arche Perdue. Dans le Mystère de la Grande Pyramide, Jacobs emmène Mortimer dans l’Egypte de l’après-guerre. L’archéologue amateur est empêtré dans une intrigue autour de la pyramide de Khéops, qui mêle thriller à rebondissements et enquête archéologique, avec même un soupçon de surnaturel.

Je ne crois pas que Spielberg connaissait cet album avant de commencer le tournage du premier Indiana Jones. Pourtant, on a parfois l’impression de voir dans le film des images tirées de la bande dessinée. Coïncidences, peut-être, ou plus probablement emprunts communs aux films et romans d’aventure d’avant-guerre. Spielberg et Lucas n’ont jamais caché que leur aventurier intrépide rendait hommage au cinéma de genre et aux feuilletons de l’âge d’or d’Hollywood. Jacobs et Hergé étaient eux aussi de grands amateurs de cinéma populaire.

Les aventures d'Indiana Jones (l'album de Tintin imaginaire)

Indiana Jones à la manière de…

En découvrant cet été au cinéma Indiana Jones et le Cadran de la destinée, l’ultime épisode de la saga, j’ai eu envie de rendre un hommage combiné à Indy, Tintin, Blake et Mortimer, ces héros qui m’ont tant marqué. A la suite de ma série Tintin vs Star Wars, j’ai donc tenté de dessiner Indiana Jones dans le style ligne claire. Cette fois, un peu plus à la façon de Jacobs que celle d’Hergé, mais sans véritablement coller au style de l’un ou de l’autre.

J’ai été aussi inspiré par le dessinateur Adam Murphy, qui s’est amusé lui-même à mélanger les deux univers sur son compte instagram.

La ligne claire, c’est plus difficile que ça en a l’air. Ce style de dessin, popularisé par Hergé, se caractérise par des traits nets et des aplats de couleur. Pas d’ombres donc (ou très peu). Pas de masse noire. Pas de hachures. Tout repose sur le trait.

Indiana Jones dessiné façon ligne claire, à la manière de Hergé ou Jacobs

C’est un exercice d’épure, dans lequel il faut aller à l’essentiel. Ça a l’air simple, mais éliminer toutes les lignes superflues et simplifier les formes demande une grande maîtrise du dessin.

Cette difficulté dissimulée derrière la simplicité apparente explique pourquoi il fallait autant de temps à Hergé ou Jacobs pour dessiner un album. Derrière chaque case encrée, il y a de multiples dessins pour trouver la bonne posture, la bonne expression.

Dans mon cas, je n’ai dessiné qu’un essai, au crayon puis à l’encre, dans mon carnet. Mais je l’ai beaucoup retravaillé ensuite sur Adobe Illustrator avant de parvenir à l’illustration finale.

Indiana Jones et le Temple du soleil

Mais quelle scène des Aventuriers de l’Arche perdue illustrer ? Le film ne manque pas de morceaux de bravoure. Entre toutes les séquences culte qui parsèment le film, une image s’est rapidement imposée, comme une évidence. Dans la séquence d’ouverture, en Amérique du sud, Indiana Jones découvre la tombe qu’il recherche. Après avoir déjoué les pièges mortels qui en protègent l’entrée, il s’apprête à mettre la main sur l’idole en or qu’il convoite…

Cette scène aurait pu figurer dans Le Temple du soleil, un des mes albums de Tintin préféré, auquel d’ailleurs E.P. Jacobs a activement collaboré, juste avant de créer Blake et Mortimer.

L’aventure a un nom…

La création de cette illustration m’a beaucoup amusé, même si elle m’a obligé à sortir de ma zone de confort, surtout pour le couler au plus près du style de la ligne claire de Hergé et Jacobs. Le choix de Adobe Illustrator, et du dessin vectoriel, m’a donné un peu de fil de retordre à cet égard. J’ai beaucoup hésité aussi sur le choix des couleurs et du rendu final.

Mélanger les deux univers dans ce dessin m’a aidé aussi à mettre le doigt sur une autre ressemblance évidente entre Tintin et Indiana Jones. Les deux personnages sont tous deux entrés dans la légende. Ils sont devenus deux références incontournables de la pop culture. Ils ont marqué plusieurs générations et ont inspiré des artistes et créateurs dans le monde entier.

Aujourd’hui encore, leur étoile pâlit un peu. Le Cadran de la destinée n’a pas attiré les foules dans les salles obscures. Les enfants lisent moins Tintin. Mais l’un comme l’autre ne sont pas près de tomber dans l’oubli.

L’aventure a un nom… Cette tagline inventée pour Indiana Jones s’applique aussi parfaitement à Tintin. Parions que dans un siècle, comme d’Artagnan ou Sherlock Holmes, les deux personnages seront toujours synonymes d’évasion et d’aventure.

Comme le projet m’a beaucoup plu, il n’est pas impossible que je revisite d’autres aventures d’Indiana Jones à la lumière de Tintin.


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5 commentaires sur “Indiana Jones vs Tintin

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