C’est un peu par hasard que nous avons visité l’exposition Les Mondes de Paul Delvaux, à La Boverie à Liège. Nous pensions tout savoir sur ce peintre surréaliste. Ses femmes hagardes et ses paysages ferroviaires ne nous faisait plus guère d’effet.
Mais la visite nous a réservé quelques surprises. C’est finalement avec beaucoup de plaisir que nous sommes laissés entraîner dans son univers étrange.
Fin décembre 2024. Nous retrouvons des amis à Liège. Il fait tellement pluvieux que nous renonçons à notre projet initial (le Marché de Noël) pour une après-midi au musée de La Boverie. Au programme : une exposition rétrospective de l’œuvre de Paul Delvaux et les collections permanentes du musée.
Les mondes de Paul Delvaux
Après Magritte, Paul Delvaux est le plus connu des peintres surréalistes belges. Quand on pense à ses peintures, c’est d’abord à ses étranges femmes dévêtuées au regard absent qui déambulent dans des gares étrangement désertes. Et, en effet, ça résume assez bien son oeuvre. Mais pas tout à fait.

Une obsession pour les gares
Né un peu avant le siècle, en 1897, Paul Delvaux est d’abord influencé par le symbolisme, le postimpressionnisme et l’expressionnisme. Il explore ces courants, sans vraiment y trouver sa voie.
Comme le montre le tableau Les Cheminots, au début de l’exposition, les gares et les trains le fascinent déjà. Cette obsession ne le quittera jamais. Il sera même nommé chef de gare honoraire de Louvain-la-Neuve en 1985.

Le déclic surréaliste
C’est devant un tableau de Giorgio De Chirico que Delvaux a le déclic surréaliste. L’artiste italien peint des silhouettes perdues dans d’immenses cités abandonnées. Ces étranges paysages mélancoliques servent de détonateurs à la créativité de Paul. C’est à partir de là que se développent son univers et son style personnels.
Le musée Spitzner
Delvaux a été profondément marqué par le musée Spitzner, qu’il a découvert sur la Foire du Midi, à Bruxelles. Cette attraction foraine présentait des moulages en cire de corps humains et des monstruosités.
L’exposition présentait un de ces moulages (un corps de femme) à côté de différents tableaux inspirés par cette attraction.

Une fascination pour l’antique
L’univers du peintre ne se limite pas aux gares. Delvaux a aussi été fasciné par le monde antique et les fouilles archéologiques (dont celles de Pompéi). Des cités antiques reconstituées constituent le décor de plusieurs de ses tableaux. Et il a même décoré à l’antique l’intérieur de la maison de Gilbert Périer, le directeur de la Sabena.

Des squelettes très vivants
Delvaux dessinait très bien les squelettes. Beaucoup mieux que les femmes diront les mauvaises langues. Il en a mis dans beaucoup de tableaux.
Il a même détourné des tableaux religieux reconnus, comme la Passion du Christ ou La descente de croix, en les peuplant uniquement de squelettes. Curieusement ces squelettes semblent plus vivants que les personnages de chair dans ses tableaux.
Ces scènes religieuses et leurs squelettes ont fait scandale à l’époque. Elles ont été censurées et jugées hérétiques par le Vatican.

Des architectures réalistes et irréelles
Ce qui frappe, lorsqu’on s’approche des tableaux, c’est la minutie avec laquelle Delvaux dessine et peint les architectures qui composent ses décors. Pourtant, le réalisme de ces décors n’est qu’une illusion, que vient détruire un examen approfondi. Le peintre prend ainsi beaucoup de libertés avec les règles de perspective. Ces cités ou ces gares où le regard déambule se révèlent ainsi des décors de théâtre à la Escher.
Jules Verne
Les œuvres de Jules Verne ont nourri l’imaginaire du jeune Delvaux. Bien plus tard, le peintre a rendu hommage à l’écrivain dans plusieurs tableaux.

Influences et reconnaissances
Paul Delvaux a aussi influencé différents artistes en dehors de la Belgique. Ses toiles ont servi de décor à un clip expérimental de Serge Gainsbourg (pour l’album Melody Nelson). Et Andy Warhol a réalisé le portrait de l’artiste (visible au tout début de l’exposition).

Conclusion : des mondes pas si figés
L’exposition Les mondes de Paul Delvaux est une belle réussite. Les oeuvres présentées sont nombreuses et de qualité. Le parcours, d’abord chronologique puis thématique, est agréable. Il permet surtout de dépasser cette image un peu caricaturale d’un peintre à l’univers figé.
Personnellement, j’ai pris beaucoup de plaisir à replonger dans cet univers onirique. Il faut prendre le temps de bien regarder les tableaux. Pour en admirer les détails et se laisser imprégner de leur atmosphère si particulière.

Infos pratiques
L’exposition Les Mondes de Paul Delvaux se déroule à La Boverie, le musée d’art de Liège, jusqu’au 16 mars 2025.
Le musée est ouvert de 10h à 18h, tous les jours sauf le lundi.
En parallèle, de l’exposition Les Mondes de Paul Delvaux, la Boverie accueille la Triennale de gravure.
Tarifs
Billet combiné Expo Delvaux + Beaux Arts (collection permanente) + Triennale de la gravure
- Standard : 18 €
- Jeune (6-25 ans) : 12 €
- Enfant de moins de 6 ans : Gratuit
Plus d’infos et réservation sur la billetterie du musée de la Boverie
Visite nue
Plus insolite, le musée organise le 28 février une visite nue de l’exposition Delvaux.

Astuce
Si vous vous déplacez à Liège pour voir l’exposition Delvaux, profitez-en pour visiter les collections permanentes de la Boverie. Vous y trouverez notamment deux tableaux de Magritte, l’autre maître du surréalisme belge.
Les collections permanentes s’étendent de la Renaissance à nos jours. Elles ne sont pas très grandes, mais comportent quelques belles pièces, dont un Picasso, un Monet, un Gauguin et un portrait célèbre de Napoléon Bonaparte par Ingres.

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Je connaissais Paul Delvaux depuis peu, par l’intermédiaire d’une émission de télévision.
Mais tu nous fais découvrir son univers, un peu à part et intéressant malgré tout.
Effectivement, cela peut paraître étrange si l’on considère seulement ses squelettes vivants dans des gares vides.
Cependant dans ton article, apparaissent d’autres mondes, ses architectures, son côté antique, etc… et j’ai apprécié !
Merci beaucoup pour cette exposition.
J’ai découvert également un autre peintre belge Jean-Jacques Gailliard, d’un style différent, mais qui lui aussi, a cherché d’autres styles et inspirations. Le tableau que j’ai vu de lui, était une ruelle de Bruxelles dans des tons fondus, de forme haute et étroite. Je l’ai trouvé réussi.
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Je ne connais pas du tout Gailliard. Je vais aller voir ça…
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Je découvre ce peintre, je connais Magritte mais lui. Pourtant, il aime les gares, j’aurais du croiser son chemin alors ! ^^
J’aime bien ces squelettes et ces perspectives approximatives aussi !
Une visite naturiste, c’est le première fois que je vois cela, c’est original !
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